Tout commence par une quête de justice ; mais très vite, cette campagne révèle que Daenerys n'est pas apte à gouverner, car jusqu'à présent, elle ne s'est jamais arrêtée pour regarder en arrière et gérer les conséquences de ses actions. Beaucoup contredisent cet argument en disant que Daenerys est jeune et inexpérimentée, et qu'ainsi elle apprends et s'améliore et que les gens devraient lui laisser du temps pour faire ses preuves. Il y a sûrement du vrai dans cet argument, mais il y a aussi de nombreux signaux d'alarme indiquant qu'elle est vouée à l'échec.
Pour faire clair, ce n'est pas juste parce qu'elle est une des méchante, comme beaucoup le concoivent en étudiant la théorie que Daenerys est un personnage tragique, vouée à échouer non seulement dans sa quête du Trône de Fer, mais aussi dans le rôle de sauveur dont Westeros a besoin alors que l'apocalypse approche. Daenerys est vouée à échouer à cause de ses dragons, et à cause du pouvoir de ses ancêtres qui était basé sur des fondations instables qui ont fini par causer leur chute. Il n'y a pas besoin de revoir les histoires des pires d'entre eux comme Maegor ou Aerys pour envisager la possibilité que, comme tous les Targaryen qui l'ont précédée, Daenerys est l'histoire d'un avertissement.
Pour commencer, la conquête et le règne de Daenerys dans la Baie des Serfs regroupe plusieurs points communs avec ses ancêtres. Son faible pour les opprimés n'est pas sans rappeler Aegon V, tout comme les raisons de ses échecs.
On savait que cette résistance poussait à bout la patience d'Aegon - surtout parce que les compromis auxquels un roi est souvent contraint pour régner repoussent toujours davantage ses projets. Au fur et à mesure des événements, Sa Grâce se vit obligée de céder aux seigneurs récalcitrants plus souvent qu'il ne l'aurait voulu. Féru d'histoire et amoureux des livres, Aegon V répéta souvent que, s'il avait eu des dragons comme le premier Aegon, il aurait pu remodeler le royaume, et assurer la paix, la prospérité et la justice pour tous. Le Trône de Fer : les origines de la saga, les rois Targaryen : Aegon V
Aegon V, contrairement à ses ancêtres et descendants, a eu l'opportunité de vivre, interagir avec les gens du peuple et de les comprendre, suite à sa jeunesse passée à servir le chevalier Duncan le Grand comme écuyer. Cela lui a donné envie de mener à bien des réformes pour qu'ils aient plus de droits. Mais vouloir n'est pas suffisant : il a pu développer de la compassion pour eux, mais il n'a pas vraiment appris à évoluer dans ce système ni à le comprendre pour pouvoir faire des réformes qui fonctionneraient. En vieillissant, il est devenu de plus en plus persuadé que les dragons seraient la solution, le rendant obsédé par la magie et aboutissant à terme sur la tragédie de Lestival.
Avec l'âge, Aegon V s'était pris à rêver de dragons volant de nouveau sur Westeros. En cela, il ne différait pas de ses prédécesseurs, qui chargeaient des septons de prier sur les derniers oeufs, des mages de prononcer des sorts et des mestres de les étudier. Ses amis et conseillers tentèrent de le dissuader, mais le roi Aegon avait la certitude toujours plus forte que seuls des dragons lui permettraient d'opérer les changements qu'il désirait pour le royaume et de forcer les orgueilleux seigneurs des Sept Couronnes à les accepter.
Les dernières années du règne d'Aegon V se consummèrent en une quête d'anciens savoirs sur l'élevage des dragons à Valyria. On dit qu'Aegon finança des voyages en des lieux aussi reculés qu'Asshaï-les-Ombres avec l'espoir d'y retrouver une science qui n'aurait pas été transmise à Westeros.
Ce rêve de dragons s'acheva par une terrible tragédie née dans un moment de joie. Le Trône de Fer : les origines de la saga, les rois Targaryen : Aegon V

Cela fait écho à l'arc de Daenerys, persuadée que sans ses dragons elle ne pourra pas maintenir ses positions.
« Aegon le Conquérant mit les Sept Couronnes à feu et à sang, mais il leur offrit ensuite paix, justice et prospérité. Or, je n’ai quant à moi apporté que mort et que ruine à la baie des Serfs. A frapper, piller puis courir plus loin, je me suis comportée plus en khal qu’en reine. » A Storm of Swords, Daenerys VI
Mère des Dragons, se dit Daenerys. Mère des monstres. Qu’ai-je lâché sur le monde ? Je suis reine, mais mon trône est bâti d’os calcinés, et repose sur des sables mouvants. Sans dragons, comment pouvait-elle espérer tenir Meereen et, plus encore, reprendre Westeros ? Je suis du sang des dragons, songea-t-elle. Si ce sont des monstres, j’en suis un aussi. A Dance with Dragons, Daenerys II
Contrairement à la tentative désastreuse d'Aegon V à Lestival, elle parvient à faire naître des dragons, mais même cela ne suffit pas. “Feu et sang” ne peut vouloir dire qu'un règne par la peur, et comme on le voit avec les Lannister, c'est une solution qui ne peut fonctionner que sur le court terme, pas sur le long terme.
Il était écrit que, le jour du Fléau, toutes les collines à cinq cents milles à la ronde avaient éclaté pour remplir les airs de cendres, de fumées et de feux, des embrasements si torrides que même les dragons dans les cieux avaient été engloutis et consumés. De grandes déchirures s’étaient ouvertes dans le sol, avalant les palais, les temples, des villes entières. Les lacs étaient entrés en ébullition ou s’étaient mués en acide, les montagnes avaient explosé, des fontaines ardentes avaient vomi de la roche en fusion mille pieds dans les airs, des nuées rouges avaient fait pleuvoir le verredragon et le sang noir des démons, et au nord le sol s’était crevassé, effondré sur lui-même, et une mer en fureur s’y était ruée. La plus orgueilleuse ville du monde s’était volatilisée en un instant, son fabuleux empire avait disparu en un jour, les Terres de l’Éternel Été avaient été calcinées, noyées et stérilisées.
Un empire bâti sur le sang et sur le feu. Les Valyriens ont récolté le grain qu’ils avaient semé. A Dance with Dragons, Tyrion VIII

L'idée qu'Aegon le Conquérant était un monarque juste qui a apporté la paix et la stabilité à Westeros est une fable que les Targaryen se sont racontés pendant des siècles. Le Conflans était gouverné par le tyrannique Harren le Noir, et ses vassaux ont soutenu Aegon dans la conquête de cette région ; mais pour le reste du continent, il n'était pas question de justice ou de besoin comme veut nous le faire croire HOTD avec cette débilité de prophétie. Aegon a conquis Westeros parce qu'il en avait l'envie et les moyens. Il était plus un conquérant qu'un dirigeant, laissant cette partie à ses soeurs/épouses. Et des années de guerre ont continué à Dorne, dont les habitants refusaient de se soumettre, causant même la mort de Rhaenys lors d'une énième tentative de conquête de la région.
Si vous regardez encore plus loin, la conquête de l'Ancienne Ghis par les Valyriens est étrangement similaire à la façon dont Daenerys a conquis la Baie des Serfs, plus spécifiquement Meereen.
[...] l'Ancienne Ghis, cité bâtie sur l'esclavage. Le nom de son fondateur légendaire, Grazdan le Grand, demeure si révéré qu'on appelle encore ainsi les garçons dans les familles esclavagistes. Selon les plus vieilles chroniques ghiscaries, il institua les corps de légionnaires équipés d'un long bouclier et de trois javelots, les premiers à marcher au pas et à se battre de façon disciplinée. L'Ancienne Ghis et son armée entreprirent de coloniser les alentours, puis de soumettre ses voisins plus éloignés. Ainsi naquit le premier empire, qui domina la région des siècles durant.
C'est de la grande péninsule, sur l'autre rive de la baie des Serfs, que vinrent ceux qui allaient mettre fin à l'Empire ghiscari - mais pas à toutes ses pratiques. Abrités par les Quatorze Flammes, de grandes montagnes volcaniques, les Valyriens apprirent à dompter les dragons et à en faire la plus terrible arme de guerre que le monde ait jamais connue. Les Valyriens prétendaient même descendre des dragons et être parents de ceux qu'ils contrôlaient. Le Trône de Fer : les origines de la saga, Histoire ancienne : l'ascencion de Valyria
Pour faire une comparaison historique, on peut dire que l'Ancienne Ghis est l'équivalent de la civilisation égyptienne, et que les Valyriens étaient l'équivalent de la dynastie des Ptolémées en Egypte, originaires de Macédoine en Grèce.
Dans cette enfance du monde, cinq grandes guerres légendaires eurent lieu entre les Possessions et l'Ancienne Ghis, et toutes se terminèrent par la victoire des Valyriens sur les Ghiscaris. La cinquième fois, les Possessions veillèrent à ce qu'il n'y en ait pas de sixième. Les remparts en brique de l'Ancienne Ghis, élevés autrefois par Grazdan le Grand, furent rasés. Les colossales pyramides, les temples, les maisons furent livrées à la flamme des dragons. On recouvrit les champs de sel, de chaux et de crânes. Nombre de Ghiscaris périrent, et d'autres, réduits en esclavage, succombèrent en travaillant pour les vainqueurs. Les Ghiscaris, devenus de simples sujets du nouvel empire valyrien, oublièrent avec le temps la langue de Grazdan pour apprendre le haut valyrien. Ainsi meurent les empires alors que d'autres naissent.
Les vestiges du fier empire de l'Ancienne Ghis sont maigres - quelques cités accrochées à la baie des Serfs comme des chancres, une autre qui se voit comme l'Ancienne Ghis ressuscitée. Car après le Fléau qui s'abattit sur Valyria, les cités de la baie purent briser les derniers fers valyriens et se gouverner seules. Les Ghiscaris rescapés reprirent prestement le commerce des esclaves. Mais alors qu'ils se procuraient jadis des captifs par les conquêtes, ils devaient désormais en acheter et les élever. Le Trône de Fer : les origines de la saga, Histoire ancienne : l'ascencion de Valyria

Après leur conquête, les Valyriens ont fait des Ghiscari survivants leurs esclaves, forcés de mourir dans leurs autres conquêtes ou dans les mines des Quatorze Flammes. Ce cycle a été perpétué, et après le Fléau de Valyria, qui a provoqué la chute des Valyriens et du pouvoir apporté par leurs dragons, les Ghiscari ont repris leur royaume et ont répété ce cycle. Ce n'est pas une nouvelle information que les Valyriens ont fait leur fortune grâce à l'esclavage. Cependant, il est intéressant de noter les similitudes avec la conquête de Daenerys, qui a causé des incendies qui ont détruit des arbres et des pénuries de nourriture qui affectent l'économie en plus de la transition pour sortir d'un modèle basé sur l'esclavage.
« Vous parliez d’aide. Commercez avec moi, en ce cas. Meereen a du sel à vendre, et du vin…
— Du vin ghiscari ? » Xaro fit la grimace. « La mer fournit tout le sel dont Qarth a besoin, mais je prendrai volontiers la totalité des olives que vous voudrez bien me vendre. De l’huile d’olive, également.
— Je n’en ai pas à proposer. Les esclavagistes ont incendié les arbres. » Depuis des siècles, on cultivait des oliviers sur les bords de la baie des Serfs, mais les Meereeniens avaient bouté le feu à leurs oliveraies quand l’ost de Daenerys avait avancé sur eux, lui laissant traverser des terres brûlées. « Nous replantons, mais il faut sept ans avant qu’un olivier commence à donner des fruits, et trente avant qu’on puisse véritablement le considérer comme productif. » A Dance with Dragons, Daenerys III
Elle n'a pas brûlé les arbres, mais elle a provoqué la mise à sac de Meereen, et les actions des esclavagistes ne sont pas sans rappeller Aerys II “qu'il soit le roi des cendres” s'il était parvenu à brûler tout Port-Réal grâce au feu grégeois. Bizarrement, Daenerys ne réalise pas à quel point elle est dans une position similaire à celle de Robert. Robert n'avait pas de problème à ordonner l'assassinat d'une adolescente de treize ans car elle était “du frai de dragon”, et Daenerys fait aussi des généralités en ordonnant la mort de tout garçon de plus de douze ans portant un tokar.
Ned dédaigna feindre la surprise. Il savait trop bien que Robert exécrait les Targaryens jusqu’à la démence. Il se rappelait trop bien sa prise de bec violente avec lui, le jour où Tywin Lannister avait eu le front d’offrir au nouveau roi, pour gage de sa loyauté, les cadavres de la femme et des enfants de Rhaegar. Lui-même disant « meurtre » et Robert « guerre ». Il se souvenait trop bien d’avoir protesté que le jeune prince et sa sœur n’étaient que des bambins, et de s’être entendu rétorquer : « Tes bambins ? du frai de dragon, voilà tout ! » Jon Arryn lui-même s’était révélé impuissant à calmer l’orage. Et il se souvenait trop bien de la fureur froide qui l’avait jeté sur les routes, ce jour-là, pour aller livrer dans le sud, seul, les ultimes batailles. Il se souvenait enfin trop bien qu’il avait fallu une autre mort, la mort de Lyanna, et leur deuil commun, pour amener la réconciliation...
En l’occurrence, il résolut de garder son sang-froid. « Votre Majesté le sait, la donzelle n’est guère plus qu’une enfant. Il faudrait être Tywin Lannister, pour assassiner des innocents. » A ce qu’on racontait, les larmes de la fillette tirée de dessous son lit n’avaient nullement ému les tueurs. Et, quoique son frère fût encore au sein, ils n’avaient pas davantage hésité à l’en arracher pour lui fracasser le crâne contre un mur.
« Et jusqu’à quand son innocence durera-t-elle ? répliqua Robert, la bouche mauvaise. Cette enfant-là écartera bien assez tôt les cuisses pour se mettre à pondre des tripotées de dragons. Merci du fléau ! A Game of Thrones, Eddard II
« Immaculés ! » Elle parcourut au galop leur front, sa natte d’or argenté flottant derrière elle, et sa clochette d’argent tintant à chaque foulée. « Tuez Leurs Bontés vos anciens maîtres, tuez les soldats, tuez tout ce qui porte un tokar ou manie un fouet, mais épargnez les enfants de moins de douze ans, et brisez les chaînes de chaque esclave que vous croiserez. » Elle éleva bien haut les doigts de harpie... mais pour les jeter de côté. « Liberté ! entonna-t-elle, dracarys ! dracarys !
— Dracarys ! s’écrièrent-ils en retour, et jamais mot sonnant à ses oreilles n’avait eu tant de suavité. Dracarys ! Dracarys ! » Et, tout autour, des négriers coururent et sanglotèrent et conjurèrent et périrent, et l’atmosphère poussiéreuse se vit saturée de fer et de feu. A Storm of Swords, Daenerys III

Daenerys ne cesse de répéter qu'elle n'est qu'une enfant à 15/16 ans et qu'elle continue d'apprendre, et les gens se servent de cet argument pour justifier ses agissement. Mais ces jeunes garçons vêtus de tokars, leur a-t-elle laissé une chance d'apprendre ? Son intention de mettre un terme à l'esclavage est sans doute inspirante, mais les conclusions qu'elle tire des gens sont les mêmes que font les gens à son sujet. La Rébellion de Robert s'est produite pour se débarasser de la dynasty Targaryen, dont le règne avait déjà été fragilisé par Aerys II qui exécutait de façon arbitraire des nobles et par l'absence des dragons, que les Targaryen ne pouvaient plus utiliser comme moyen de pression. Techniquement, si on suit la logique de Daenerys, aucun tort n'a été fait ni à sa famille, ni à elle, alors que, si la Rébellion était bien justifiée, les meurtres et tentatives de meurtres de femmes et d'enfants ne l'étaient pas. Peu importe comment a tourné Viserys ou comment Daenerys pourrait tourner, rien ne justifiait cela, et on peut même dire que Robert n'a pas donné d'autres possibilités à Daenerys de tourner autrement à cause de l'environnement dans lequel elle a grandi. Elle n'avait aucun foyer, aucune attache, et ainsi elle a continué ce cycle avec d'autres.
Autre détail, elle n'interdit pas totalement l'esclavage. Elle autorise d'anciens esclaves à se revendre, et garde même le paiement.
« Que souhaitez-vous obtenir de moi, capitaine ?
— Des esclaves, répondit-il. J’ai mes soutes pleines à éclater de peaux de zéquion, d’ambre gris, d’ivoire et de tas d’autres denrées précieuses. J’aimerais les échanger ici contre des esclaves que j’irais vendre à Lys et à Volantis.
— Nous n’avons pas d’esclaves à vendre, dit-elle.
— Ma reine ? » Daario s’avança. « Au bord de la rivière, il y a tout plein de Meereeniens qui demandent la permission de se vendre à lui. Tout plein, plus dru que les mouches. »
Ce fut un choc pour elle. « Ils veulent être esclaves ?
— Ceux qui sont pour ont le parler fleuri de leur noble origine, reine de mon cœur. C’est très coté, des esclaves pareils. On en fera, dans les cités libres, des scribes ou des précepteurs, des chaufferettes et même des prêtres ou des guérisseurs. Ils coucheront dans des lits douillets, mangeront des nourritures riches et habiteront de belles demeures. Ici, ils ont tout perdu, et ils vivent dans la peur et dans la misère.
— Je vois. » Peut-être, au fond, n’était-ce pas si choquant que ce qu’on lui rapportait, si c’était bien vrai..., à propos d’Astapor.
« Tout homme qui veut spontanément se vendre comme esclave est autorisé à le faire. Femme aussi. » Elle leva une main. « Mais interdiction est faite aux parents de vendre leurs enfants. Et au mari sa femme.
— A Astapor, la ville prélevait un dixième du prix, chaque fois qu’un esclave changeait de mains, glissa
Missandei.
— Nous ferons de même », décida Daenerys. Après tout, l’or servait autant que les épées à gagner les guerres. « Un dixième. En pièces d’or, d’argent ou bien en ivoire. Meereen n’a que faire de safran, de girofle ou de peaux de zéquion. » A Storm of Swords, Daenerys VI
Les esclaves n'ont ni possession ni argent. En gros, elle est la seule qui reçoit un paiement - avec des intérêts - et elle accepte cela car il lui faut de l'argent pour financer sa guerre. Elle n'a jamais payé ces esclaves, parce qu'elle n'a jamais eu l'argent pour le faire. Alors qu'elle se fasse payer quand ils se revendent en esclavage ne la présente pas sous un très bon jour, parce que c'est plus que du profit. S'ils étaient des personnes qu'elle avait libéré, qui se sont revendues en esclavage, elle n'est pas supposée les posséder. Mais en faisant cela, elle montre qu'elle ne les voit que comme ses propriétés.
Des gens ont comparé les passages ci-dessus aux interactions de Jon Snow avec le peuple libre - notamment le fait qu'il utilise leur or et leurs bijoux pour régler une dette avec la Banque de Fer et qu'il mette le peuple libre au travail. Mais ce sont plus des juxtapositions que des parallèles, car le peuple libre n'a jamais été esclave avant. Au contraire, pour eux, si ils veulent quelque chose possédé par quelqu'un d'autre, il est dans leur droit de le réclamer s'ils sont assez forts pour attaquer. Ils envahissent Westeros sous le commandement de Mance pour espérer survivre à l'hiver. Ils savaient qu'ils risquaient de mourir et sont donc venus dans le sud pour survivre, mais ce faisant ils ont aussi attaqué aussi bien des soldats que des civils. Donc dans ce cas, la Garde de Nuit était dans son droit d'essayer de défendre le royaume contre eux. C'est vraiment une situation “le héro est le méchant dans le camp d'en face”, mais le manque de discipline et de compréhension des limites au sein du peuple libre finit par pousser les gens à bout. Jon n'est pas un roi - un rôle occupé par Stannis, et il fait plier et abandonner leurs dieux. Stannis et Melisandre les soumettent et la Garde de Nuit n'est pas supposée prendre part aux affaires du royaume. Jon utilise il est vrai des méthodes douteuses, mais il trouve un moyen d'à la fois leur faire respecter les règles et se battre pour le royaume, tout en faisant en sorte qu'ils aient plus de droits et de la nourritre. Il y a une différence entre des gens qui envahissent un pays, deviennent prisonniers de guerre, établissent un contrat et un compromis avec un entremetteur, et des esclaves affranchis faisant partie d'une longue tradition d'esclavage qui se revendent en esclavage avec une reine qui garde l'argent de leur paiement pour financer une guerre sur un autre continent. Ce ne sont pas des situations comparables.
A Meereen, elle transforme des nobles en esclaves pour les faire travailler aux champs parce qu'il lui faut de la nourriture, ce qu'ont aussi fait les Valyriens quand ils ont pris l'Ancienne Ghis.
« L’esclavage ne se compare pas à la pluie, insista-t-elle. J’ai subi la pluie et j’ai été vendue. Ce n’est pas la même chose. Nul homme ne souhaite être un bien. »
Xaro haussa les épaules avec langueur. « Il se trouve que, quand j’ai posé le pied sur la rive de votre douce cité, mon regard est par hasard tombé, au bord du fleuve, sur un homme qui avait jadis été un invité dans ma demeure, un marchand qui faisait commerce d’épices rares et de vins de choix. Il allait torse nu, avec sa peau rouge qui pelait, et, de toute évidence, il creusait un trou.
— Pas un trou. Un fossé, pour amener l’eau du fleuve jusqu’aux champs. Nous avons l’intention de planter des haricots. Les champs de haricots ont besoin d’eau.
— Que mon vieil ami est aimable d’aider au terrassement. Et comme cela lui ressemble peu. Se pourrait-il qu’on ne lui ait pas donné le choix sur ce point ? Non, assurément pas. Vous n’avez pas d’esclaves, à Meereen. »
Daenerys rougit. « On paie votre ami en nourriture et en gîte. Je ne peux lui rendre sa fortune. Meereen a besoin de haricots plus que d’épices rares, et les haricots exigent de l’eau.
— Mettriez-vous mes danseurs à creuser des fossés, eux aussi ? Douce reine, dès qu’il m’a vu, mon vieil ami est tombé à genoux et m’a supplié de l’acheter comme esclave et de le ramener à Qarth. »
Elle eut l’impression qu’il venait de la gifler. « Eh bien, achetez-le donc.
— Ne vous déplaise. Je sais que cela ne lui déplaira pas, à lui. » A Dance with Dragons, Daenerys III
Elle ne nomme pas cela esclavage, mais c'est ce que c'est. Même avec les Immaculés, elle ne les paie qu'en repas - ce que faisaient aussi les esclavagistes. Ce n'est pas pour dire qu'elle n'a rien : elle a tenté de mettre un terme à la violence gratuite subie par les esclaves, car elle en a été témoin au premier plan. Mais pas une fois n'évoque-t-elle le concept de travail rémunéré - même pour ceux qu'elle essaye de sauver. C'est un modèle qu'elle reprends de l'organisation d'un khalasar Dothraki, basé sur la force, et bien sûr la capture des vaincus pour les vendre en esclavage.
Ironiquement, Daenerys se sert aussi de son privilège Targaryen/Valyrien tout en revendiquant le titre de “briseuse de chaîne”, alors que les Valyriens étaient connus pour leur conquête de terres, la capture d'esclaves et l'exploitation de ces derniers dans les Quatorze Flammes pour extraire de l'or et de l'argent. Il y a beaucoup de contradictions dans son souhait d'abolir l'esclavage, tout en se sentant fière d'une culture qui a prospéré grâce à l'esclavage. De plus, elle n'en veut pas à Jorah d'avoir pratiqué l'esclavage et de s'être mis en exil pour éviter une sentence, mais parce qu'il l'a trahie. Daenerys ignore beaucoup d'aspects de l'esclavage et des esclavagistes, si cela lui est profitable. Ce n'est pas seulement parce qu'elle a manqué d'indépendance avant.
Bien sûr, on ne peut pas s'attendre à ce que Daenerys ne sache tout et ne remette tout en question, car elle est encore très jeune, et malgré ses expériences, assez naïve et ignorante du fonctionnement des villes, des royaumes, et de la façon de gouverner. Elle essaye d'apprendre, en dépit de ses instincts d'agir en conquérante, et elle fait des compromis. Pour garder la paix à Meereen après la mise à sac de la ville, elle doit laisser l'esclavage se passer en dehors de la ville. On ne peut pas arrêter l'esclavage en un seul geste dramatique, surtout après son arrivée violente en tant que conquérante. Ce genre de transition demande beaucoup de temps. Mais tout comme Aegon V, elle ne comprends pas que pour mettre fin à l'oppression, il faut convaincre les nobles de la nécessité de mettre fin à des pratiques injustes, et de comment cela ne leur enlèverait aucun droit ni privilège. Au lieu de ça, voici ce qu'elle fait :
Une riche femme se présenta, dont le mari et les enfants avaient péri en défendant les remparts de la cité. Durant le sac, elle avait fui avec son frère, effrayée. À son retour, elle avait retrouvé sa maison convertie en bordel. Les filles se pavanaient sous ses bijoux et ses vêtements. Elle voulait récupérer ses bijoux et sa demeure. « Qu’elles gardent les vêtements », concédait-elle. Daenerys lui accorda les premiers, mais jugea que la seconde avait été perdue quand elle l’avait abandonnée. A Dance with Dragons, Daenerys I
Cela est assez hypocrite, car c'est ainsi que sa famille a été chassée de Westeros pendant la Rébellion de Robert. Si on suit sa logique, elle n'a donc aucune prétentions au trône puisqu'elle est partie de Westeros. Ses jugements sont plus arbitraires et vindicatifs que justes et équitables ; de plus, elle ne s'arrête jamais pour voir si elle est d'accord ou pas avec les injustices qu'ont subit les nobles.